Après l’avis défavorable du Conseil national consultatif des personnes handicapées (CNCPH), la Fédération française des services à la personne et de proximité (Fédésap) se prononce à son tour contre le projet de décret sur l’expérimentation d’une modulation, par les départements volontaires, des tarifs des services d’aide à domicile (Saad).

Engagée en septembre 2017, la réforme de la tarification et de l’organisation des services d’aide à domicile (Saad) doit franchir une nouvelle étape dans les prochaines semaines avec la publication d’un décret sur l’expérimentation d’une modulation des tarifs par les départements qui se porteront volontaires dans le cadre d’un appel à candidatures (voir notre article ci-dessous du 13 février 2019). Le modèle envisagé par la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) – à l’issue d’une large concertation avec les fédérations des Saad, les départements et les représentants des personnes âgées et des personnes handicapées – semblait jusqu’alors rencontrer un assez large consensus.

Pour le CNCPH, « aucun effet correctif sur les dysfonctionnements du secteur »

Mais le projet de décret définissant la répartition de l’enveloppe de crédits de 50 millions d’euros pour la préfiguration d’un nouveau modèle de financement des Saad – prévue à l’article 26 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2019 – se heurte à des réticences, notamment de la part du CNCPH (Conseil national consultatif des personnes handicapées) et de la Fédésap (Fédération française des services à la personne et de proximité).

Le 18 avril, le CNCPH a ainsi rendu un avis défavorable sur le projet de décret. L’avis du Conseil précise certes que « l’effort financier de 50 millions d’euros réalisé à destination des services d’aide et d’accompagnement à domicile est unanimement salué ». Le projet de décret soulève néanmoins « de nombreuses remarques et interrogations ».

De façon générale, le CNCPH « regrette que ce décret n’ait absolument aucun effet correctif sur les dysfonctionnements du secteur de l’aide à domicile dans son ensemble » et que « ce modèle de préfiguration ne s’attaque pas aux problèmes de fond que sont la programmation et le pilotage de l’offre des services d’aide à domicile par les départements pour répondre aux besoins des personnes, pas plus qu’il ne règle les questions de reste à charge, de liberté tarifaire ou de problématiques de contractualisation rencontrées par les acteurs ».

« Les pratiques souvent arbitraires des conseils départementaux »

Le Conseil s’interroge notamment sur les paramètres de répartition de l’enveloppe entre les départements, sur le risque de « saupoudrage » ou encore sur « la possibilité pour les services d’aides à domicile non habilités de bénéficier de la dotation complémentaire alors même qu’ils vont pouvoir continuer à demander une participation financière aux personnes qu’ils accompagnent » (allusion au conflit récurrent entre les acteurs associatifs et les acteurs commerciaux).

Le CNCPH conteste également la fixation d’un tarif de référence par département « qui ne va pas dans le sens d’une plus grande équité territoriale et entérine à l’inverse les pratiques souvent arbitraires des conseils départementaux ». Il s’interroge aussi sur la contractualisation obligatoire avec les départements, dans la mesure où « les Cpom tendent à devenir des outils qui ne répondent plus aux objectifs auxquels ils étaient destinés ». Enfin, il attire l’attention du gouvernement « sur les difficultés rencontrées par les départements, liées au respect du pacte financier ».

Or, estime le CNCPH, « l’équité de traitement territorial comme l’accès financier des services pour tous avec en ligne de mire un reste à charge zéro, méritent pourtant des règles communes définies au niveau national ».

La Fédésap « s’associe » à l’avis défavorable

Dans un communiqué du 14 mai, la Fédésap, qui représente depuis 2007 les entreprises de services à la personne, annonce qu’elle « s’associe » à l’avis défavorable rendu par le CNCPH. La fédération rejoint la plupart des observations et interrogations de ce dernier, notamment celles portant sur un « saupoudrage départemental » et sur l’absence de référence à un tarif national APA, « pour lequel la Fédésap se bat, en y ajoutant la notion d’évolution automatique (revalorisation annuelle) et de dignité du taux (qui ne saurait être inférieur à 30 euros par heure de prestation) ».

La Fédésap demande par ailleurs « une plus grande universalité » de la réforme et réitère son appel à une fusion de l’APA et de la PCH (prestation de compensation du handicap). En revanche – et sans surprise -, elle « ne rejoint pas le CNCPH dans sa proposition d’introduire des mesures restrictives pour les Saad non habilités à l’aide sociale ». La Fédésap estime en effet qu’une telle mesure créerait une différenciation entre structures habilitées et non habilitées à l’aide sociale (ce qui est le cas de quasiment toutes les entreprises privées de services à la personne) et « introduirait une discrimination manifeste au détriment de certains Saad et des personnes âgées accompagnées par ces derniers ».

Pour aller plus loin

Source : https://www.banquedesterritoires.fr/le-projet-de-decret-dexperimentation-de-la-tarification-des-saad-suscite-des-reticences?pk_campaign=newsletter_hebdo&pk_kwd=2019-05-17&pk_source=Actualit%C3%A9s_Localtis&pk_medium=newsletter_hebdo

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