Sophie Cluzel a annoncé la prolongation de la prise en charge d’activités hors du domicile (par exemple les activités d’accompagnement de personnes handicapées à l’extérieur) pour le crédit d’impôt sur les services à la personne. Olivier Dussopt a pour sa part annoncé la mise en place d’un système de tiers payant pour le crédit d’impôt des particuliers utilisant un service à domicile, directement ou via une entreprise prestataire. Les intéressés n’auront ainsi plus à attendre un an le remboursement du crédit d’impôt.

Deux annonces viennent, coup sur coup, conforter le secteur des services à la personne. Elles sont d’autant plus appréciables que ce secteur se porte plutôt mal, au moins pour ce qui concerne l’emploi direct des particuliers employeurs – autrement dit l’aide à domicile financée directement par les particuliers (avec l’appui de diverses aides sociales et fiscales) –, comme le confirme la récente étude annuelle de l’Acoss (Agence centrale des organismes de sécurité sociale) sur le sujet (voir cet article du 11 janvier 2021) ou encore le dernier sondage présenté par la Fédération des particuliers employeurs (voir cet article du 15 février 2021).

Maintien de la prise en compte des services rendus à l’extérieur… sans base légale

Dans un communiqué du 15 février, Sophie Cluzel s’emploie à rassurer les bénéficiaires de services à la personne. En effet, la secrétaire d’État chargée des personnes handicapées affirme que « compte tenu de l’utilité sociale du crédit d’impôt accordé pour les dépenses en faveur des services à la personne, soutien important aux foyers comptant une personne en situation de handicap, le gouvernement maintient l’éligibilité des dépenses engagées au titre des services à la personne réalisés pour partie en dehors du domicile, sous réserve qu’ils soient compris dans une offre globale de services ». Ces services réalisés à l’extérieur du domicile concernent par exemple les dépenses de trajet et d’accompagnement depuis ou à destination du domicile (pour accompagner une personne âgée ou handicapée dans ses déplacements), mais aussi l’accompagnement des trajets des enfants vers l’école ou les activités périscolaires.
La nécessité de cette réassurance a pour origine une décision du Conseil d’État en date du 20 novembre 2020. Celle-ci annulait les « commentaires administratifs » figurant au BOFiP (bulletin officiel des finances publiques) et précisant que la réduction d’impôt « s’applique aux prestations mentionnées à l’article D.7231-1 du Code du travail réalisées à l’extérieur du domicile, dès lors qu’elles sont comprises dans une offre de services incluant un ensemble d’activités effectuées à domicile ». Se fondant sur les articles correspondants du Code général des impôts et du Code du travail, le Conseil d’État conclut en effet que « seules ouvrent droit au crédit d’impôt prévu par l’article 199 sexdecies les sommes versées en rémunération des services, mentionnés à l’article D.7231-1, qui sont rendus au domicile du contribuable, à l’exclusion des sommes versées en rémunération des activités exercées en dehors de ce domicile ». L’enjeu n’est pas mince, puisque le crédit d’impôt est de 50% des dépenses engagées, dans la limite annuelle de 12.000 euros, majorée à 20.000 euros en cas d’invalidité.
Dans son communiqué, Sophie Cluzel précise que « le gouvernement proposera au Parlement, si nécessaire, des aménagements ultérieurs aux textes en vigueur afin de conforter la sécurité juridique des contribuables ». Il s’agit clairement là d’un euphémisme, dans la mesure ou le crédit d’impôt sur des dépenses engagées à l’extérieur du domicile se trouve désormais dépourvu de toute base légale, même si ces prestations sont intégrées à une offre globale de service. Le gouvernement a beau indiquer que le principe de cette prise en compte des services à la personne assurés à l’extérieur a été posé par une circulaire d’avril 2019 qui n’est pas visée par la décision du Conseil d’État, on voit mal comment une circulaire pourrait contredire des dispositions législatives telles qu’interprétées par la décision du Conseil. Le gouvernement devra donc en passer par une loi (a priori la prochaine loi de finances ou une loi de finances rectificative).

Un « crédit d’impôt instantané » sous forme de tiers payant

La seconde annonce émane d’Olivier Dussopt, lors de deux visioconférences successives, le 11 février, avec la Fédération du service aux particuliers (Fesp) puis la Fédération des particuliers employeurs de France (Fepem). Comme Sophie Cluzel, le ministre des Comptes publics a commencé par rassurer sur le maintien du crédit d’impôt pour les services à la personne rendus à l’extérieur du domicile. 
Mais il a surtout annoncé la création d’un « crédit d’impôt instantané ». Celui-ci devrait entrer en vigueur au « tout début 2022 » pour les particuliers employant directement leur salarié, et sans doute trois mois plus tard pour ceux qui rémunèrent leur aide à domicile par l’intermédiaire d’une entreprise prestataire de services à la personne. Ce « crédit d’impôt instantané » n’est pas une nouvelle aide fiscale, mais un mécanisme plus favorable de versement du crédit d’impôt actuel (voir ci-dessus). Il s’agit en l’occurrence d’un mécanisme de tiers payant : alors que les bénéficiaires doivent aujourd’hui attendre un an pour récupérer le crédit d’impôt, ils ne devraient plus payer que 50% du coût réel de la prestation, l’État réglant directement l’autre moitié auprès du salarié à domicile ou de l’entreprise prestataire. Le principe de cette réforme était déjà annoncé par Bercy au début de 2019 (voir cet article du 29 janvier 2019)
L’intérêt est à la fois d’éviter une avance de trésorerie de la part des bénéficiaires (aux ressources souvent modestes quand il s’agit de personnes handicapées ou de personnes âgées) et de lutter contre le travail au noir, endémique dans l’emploi à domicile (30 à 40% de l’activité, selon le président de la Fesp). Cette réforme est actuellement expérimentée sur un échantillon – étonnamment faible – de 150 personnes dans le Nord et à Paris. L’entourage d’Olivier Dussopt a indiqué que la généralisation de ce dispositif aura lieu « si les expérimentations sont concluantes », tout en précisant qu' »aucune difficulté » n’a été constatée « à ce stade ».

Pour aller plus loin

Source : https://www.banquedesterritoires.fr/services-la-personne-souplesse-maintenue-pour-le-credit-dimpot-et-tiers-payant-en-2022?pk_campaign=newsletter_hebdo&pk_kwd=2021-02-19&pk_source=Actualit%C3%A9s_Localtis&pk_medium=newsletter_hebdo

Publié le 16 février 2021, par  Jean-Noël Escudié / P2C pour Localtis

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