Fraude aux cartes de stationnement : un « privilège » en or !

Résumé : Les cartes de stationnement européennes pour personnes handicapées sont un sésame de plus en plus convoité par les fraudeurs. A Paris, 2 cartes sur 3 ne seraient pas valides. Un projet de carte infalsifiable et de fichier central est à l’étude.

Par L’AFP pour Handicap.fr, le 10-12-2014 

Dans la guerre du stationnement qui fait rage dans les centres-villes engorgés, les personnes handicapées ne sont pas épargnées ; leurs emplacements réservés suscitent les convoitises tout comme leurs cartes d’invalidité, cible des voleurs et des faussaires. Les fraudes à la carte d’invalidité sont impossibles à chiffrer. Les statistiques officielles ne distinguent pas les vols de ces macarons des autres vols. Les faux sont classés comme les autres documents contrefaits.

Vols et photocopies illégales

Mais régulièrement, des témoignages reviennent.« Un des administrateurs de notre association me racontait récemment qu’il avait amené sa voiture au garage pour une révision et quand il l’a récupérée la semaine suivante, il n’a plus trouvé sa carte », dit ainsi Nicolas Mérille, conseiller accessibilité à l’Association des paralysés de France (APF). « Mais le vol n’est pas le phénomène le plus important. Le plus courant, ce sont les photocopies couleur plastifiées ou la récupération de la carte d’une personne décédée par un proche. » Environ 1,5 million de cartes « officielles » sont en circulation. Combien en réalité ? Avec ces simples carrés plastifiés, la falsification est d’une facilité déconcertante.

Des cartes anonymes

Pour des raisons de confidentialité, aucune photo ou mention de l’identité du détenteur n’est faite sur la partie exposée derrière le pare-brise. Seuls le numéro de la carte, la date de validité et le nom de l’autorité qui l’a délivrée sont visibles. Le premier est imprimé, les deux autres sont remplis au stylo bille. « Avec une photocopieuse couleur, vous refaites une carte à l’identique », affirme Michel Eragne, de l’association Handicap Positif, avant d’énumérer les failles : « L’encre du stylo s’efface sous l’effet du soleil et après on réécrit ce qu’on veut, on a aussi constaté qu’il y avait des cartes vierges déjà tamponnées volées en préfecture…»

A Paris, 2 cartes sur 3 pas valides

Pour lui, « à Paris, deux cartes sur trois ne sont pas valides pour différentes raisons et sur ces cartes non valides, une sur deux est fausse ». Les sanctions sont théoriquement lourdes (1 500 euros d’amende pour utilisation indue, jusqu’à 5 ans de prison et 75 000 euros d’amende pour faux et usage de faux). Pour les policiers et les gendarmes, il est difficile de déceler les vrais des faux, les personnes handicapées des usurpateurs. Ils doivent se contenter de ce qu’ils voient à travers le pare-brise. « On a le droit de contrôler le permis de conduire, l’assurance et la carte grise mais la carte de stationnement pour handicapés ne fait pas partie des pièces qu’on a le droit de contrôler selon le Code de la route. Il faut une réquisition spécifique du parquet », explique le commissaire Alexis Faux, chef de la Division régionale de la circulation à Paris.« Pourtant, on sait bien que ça existe…»

Fichier national à l’étude

« Cette fraude n’est pas massive mais elle est suffisamment immorale et choquante pour qu’on y mette un terme », dit Bernard Jomier, adjoint à la mairie de Paris en charge du handicap. Après des années de demandes d’associations, le gouvernement a fait un premier pas la semaine dernière en présentant au Conseil national consultatif des personnes handicapées un projet d’arrêté qui ouvre la porte à une nouvelle carte infalsifiable, dont la fabrication serait confiée à l’Imprimerie nationale. Il envisage également la création d’un fichier national des cartes, que les forces de l’ordre pourraient consulter pour savoir immédiatement si une carte a été déclarée volée.

Au-delà de l’aspect moral, les associations estiment qu’un tel dispositif permettrait d’alléger le problème du stationnement des personnes handicapées. « A Paris, par exemple, il y a 50 000 bénéficiaires et 5 000 places, souligne Nicolas Mérille. Déjà qu’il n’y a pas suffisamment de places, si en plus il y a des utilisateurs qui fraudent…»

© B. Wylezich/Fotolia


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