Agir contre les maltraitances dans le système de santé, c’est le cri d’alarme de la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) qui, le 22 mai 2018, appelle les pouvoirs publics « à remettre l’humain au cœur du système de santé français ». Le constat est le suivant : notre système est envié dans le monde entier pour sa qualité, la compétence et le dévouement du personnel soignant. Pourtant, de nombreux actes de maltraitance, souvent tus ou minimisés, mais de plus en plus relayés dans les médias ces derniers mois, attestent de dysfonctionnements qui peuvent engendrer la souffrance des patients, des soignants et des aidants. Il est temps de « mettre fin aux atteintes au droit fondamental à l’accès aux soins » engendrées par des « impératifs de rentabilité et de productivité », dénonce Christine Lazerges, présidente de la CNCDH.

Garantir l’accès aux soins à tous

La CNCDH déplore l’exclusion du système de santé non pas en droit mais en fait des populations les plus vulnérables et marginalisées de la société (personnes en situation de précarité, handicapées, LGBT, personnes en surpoids…). Victimes de préjugés et de discriminations, confrontées à la cherté des soins, à la complexité des démarches administratives, des milliers des personnes renoncent chaque année à se faire soigner ou repoussent leurs soins. La commission recommande donc de créer une protection maladie véritablement universelle et de développer des établissements de santé soucieux de la prise en charge de tous les publics.

Une vraie maltraitance

Elle déplore ensuite : manque d’écoute, mauvaise orientation, pratique d’actes médicaux sans consentement express, refus de soins et, parfois, traitements inhumains et dégradants… « La maltraitance subie par les patients est multiforme et peut être présente tout au long du parcours de soins », assure la commission dans un communiqué. Face à cette situation, elle recommande de mettre en place une politique publique de lutte contre les maltraitances, fondée sur le principe de bienveillance, et de prévoir des recours effectifs contre les abus.

En établissements médico-sociaux ?

À ce titre, dans le champ du handicap, l’Assemblée a adopté le 16 mai 2018 un amendement du LREM Adrien Taquet pour obliger les établissements et services sociaux et médico-sociaux à désigner « un référent intégrité physique » parmi les membres de leur personnel afin que les personnes accueillies « soient sensibilisées à ce risque et aient la possibilité de se faire aider en cas d’agression ». « Cet amendement vise à lutter efficacement contre les violences physiques, notamment sexuelles, infligées aux personnes en situation de handicap, tant en milieu ordinaire qu’en établissement spécialisé », a expliqué M. Taquet. Depuis le 1er janvier 2017, déjà, un décret (N° 2016-1813) précise que tous les établissements et services sociaux et médico-sociaux ont « obligation de signaler tout dysfonctionnement grave ou événement ayant pour effet de menacer ou de compromettre la santé, la sécurité ou le bien-être des personnes prises en charge » (article en lien ci-dessous).

Les soignants sous pression

Le mal être s’exprime également du côté des soignants. Exigence de rentabilité, rationalisation des actes, dispositifs ou infrastructures inadaptés, manque de considération… autant de raisons qui mettent à mal son engagement. « Ce mode de gestion des soins engendre en effet chez les soignants de la gêne, du dégoût, de la honte et, trop souvent aussi, de la culpabilité, explique Valérie Sugg, psychologue dans un service de cancérologie hospitalier, dans une interview accordée à handicap.fr (en lien ci-dessous). Aucun soignant ne peut être fier d’une patiente dans la cinquantaine, épuisée par sa chimio et hospitalisée depuis une semaine, qui ne peut pas bénéficier d’une douche. De ce fait, ils sont malheureux parce que, s’ils ont choisi de devenir soignants, c’est justement parce qu’ils avaient un idéal, pour aider, accompagner, guérir aussi. » « Ceux-ci souffrent de ne plus avoir le temps d’être suffisamment à l’écoute des patients, poursuit la CNCDH. Ils ne peuvent plus prendre en charge de manière individualisée et globale tous les patients, et proposent des soins en fonction d’une norme et de protocoles standardisés. » Dans ce contexte, elle juge « indispensable d’améliorer les conditions d’exercice de leur profession et de reconnaître la pénibilité de leur travail ».

In fine, la CNCDH réclame une « véritable démocratie sanitaire » qui suppose de réformer en profondeur le système de santé et, notamment, d’associer davantage patients et soignants aux réflexions sur le fonctionnement des établissements et autres administrations de santé.

©  jcomp/Fotolia


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