Par Sophie Cluzel, secrétaire d’État en charge du Handicap, le
Handicap.fr ; Quelles sont les grandes nouveautés de cette rentrée 2018 pour les élèves en situation de handicap ?
Sophie Cluzel : Des efforts importants pour anticiper et préparer la rentrée ont été réalisés. Je me suis déplacée dès le 24 août 2018 dans le Calvados pour valoriser ce travail préparatoire.
Les équipes académiques et des MDPH disposent désormais d’un calendrier commun pour faciliter l’affectation des accompagnants. Un vade-mecum réalisé par la CNSA (Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie) de manière ascendante avec le concours des acteurs de terrain, et diffusé à l’ensemble des équipes concernées, recense les bonnes pratiques permettant de faire face à la croissance d’activité du printemps à la rentrée scolaire.
Le métier d’accompagnant a été promu par l’Education nationale par une première campagne de communication avant l’été.
Le recrutement des accompagnants est assoupli (décret 2018-666 du 27 juillet 2018). L’accès à l’emploi d’accompagnant d’élèves en situation de handicap (AESH) ne se limite plus aux seuls titulaires d’un diplôme de niveau 5 dans le domaine de l’aide à la personne mais permet à tout candidat disposant d’une qualification ou de prérequis lui permettant d’accompagner des élèves en situation de handicap de postuler. Les accompagnants bénéficiaires d’un emploi aidé n’ont plus besoin de le faire renouveler pendant 24 mois pour accéder à l’emploi pérenne d’AESH, ce sera possible dès 9 mois.
Pour la première fois depuis 2008 le nombre d’emploi d’AESH dépasse (et largement) les emplois aidés du fait des dotations complémentaires en AESH, bien au-delà du plan de transformation prévu par la CNH (Conférence nationale du handicap) de 2016.
H.fr : D’autres mesures ?
SC : La création programmée d’un pôle d’enseignement pour les jeunes sourds (PEJS) dans chaque académie. L’expérimentation de pôles inclusifs d’accompagnement localisés dans chaque académie. La création d’un poste d’enseignant ressource supplémentaire par département. 38 ULIS-lycée (Unités localisées pour l’inclusion scolaire) venant s’ajouter aux 40 créées en 2017/2018. La programmation de la création de 180 UEMA (Unités d’enseignement en maternelle autisme) dans le cadre de la stratégie autisme (2018-2022) ainsi que 45 unités élémentaires, dont 5 expérimentées dès la rentrée 2018.
H.fr : Reprenons en détail… La mesure phare, c’est le recrutement massif d’accompagnants supplémentaires ? Comment cela a-t-il été possible en un temps si court ?
SC : La loi de finance pour 2018 prévoit la création de 10 900 ETP (équivalent temps plein) d’AESH et 30 000 Parcours emploi compétence pour cette rentrée. Par rapport aux précédentes, les dotations en emploi ont été notifiées avant l’été pour faciliter le recrutement des équipes académiques.
H.fr : De nouvelles modalités sont prévues pour le recrutement des AESH ?
SC : En ouvrant les conditions d’accès à cet emploi, le décret assouplissant les conditions de recrutement rend possible le recrutement de compétences diversifiées (sur l’autisme par exemple) ou avec une expérience de l’accompagnement de 9 mois (et plus seulement limité à l’accompagnement des élèves en situation de handicap). Ce décret pérennise également la formation d’adaptation à l’emploi des accompagnants à hauteur de 60 heures minimales. Le recours au diplôme d’Etat d’accompagnant éducatif et social spécialité « accompagnement à l’éducation inclusive et à la vie ordinaire » est sous-utilisé, il convient d’en faire la promotion et d’en faciliter les conditions d’accès au moyen, notamment, de la VAE (validation des acquis de l’expérience). La concertation annoncée pourra aborder la question de la formation des accompagnants pour améliorer la situation actuelle.
H.fr : De l’aveu de Jean-Michel Blanquer, ministre de l’Education nationale, il est parfois difficile de faire face à l’augmentation des prescriptions des MDPH (+13% par an), un « défi d’organisation non résolu depuis 2005 », selon lui. Quelles sont les mesures prises à ce sujet ?
SC : Les mesures ont été annoncées lors de la conférence de presse commune du 18 juillet 2018. Il s’agit de relancer toutes celles permettant de renforcer l’école inclusive et l’adaptation de son environnement aux besoins éducatifs particuliers des élèves. La formation des enseignants y tient un rôle déterminant, tout comme les mesures permettant de diversifier les modes de scolarisation et de rendre possible la coopération avec le secteur médico-social dans l’école (comprenant l’intervention des professionnels du secteur libéral). Il s’agit ensuite de revoir l’organisation du dispositif en fonctionnant en pôles regroupant tous les moyens en accompagnement ; ces pôles seront expérimentés sur chaque académie dès cette rentrée.
H.fr : Chaque année, un certain nombre de bugs viennent perturber la rentrée de certains enfants handicapés. A qui les parents peuvent-ils s’adresser en urgence ?
SC : A la cellule Aide handicap école au 0 800 730 123 (nouveau numéro non surtaxé) mais également à leur DSDEN (Direction des services départementaux de l’Education nationale).
H.fr : Une instruction annonçait en août 2018 le lancement de l’expérimentation des cinq premières unités d’enseignement élémentaire autisme. De quoi s’agit-il ?
SC : Dans l’offre actuelle de scolarisation pour les enfants autistes, il est apparu qu’il manquait une offre leur permettant d’être scolarisés en école ordinaire tout en bénéficiant d’un accompagnement beaucoup plus important que celui existant actuellement (accompagnement individuel ou mutualisé dans les classes ordinaires ou ULIS). Il a donc été décidé d’expérimenter un nouveau dispositif. Pour mémoire, il s’agit d’un modèle intégré associant un enseignant spécialisé et un AVS (auxiliaire de vie scolaire) collectif de l’Education nationale, un éducateur spécialisé et un accompagnant éducatif et social du secteur médico-social.
H.fr : Quand leur ouverture est-elle prévue ? Sur quels territoires ? A quand un essaimage au niveau national ? Remplacent-elles les expérimentations déjà existantes ?
SC : Cinq ouvertures sont prévues en 2018 à Versailles, Toulouse, Rouen, Amiens et Lyon. L’instruction permettant de lancer ces expérimentations devra cependant faire l’objet d’un groupe de travail avec les associations de familles pour suivre leur déploiement et adapter le cahier des charges aux premiers constats effectués dès l’ouverture des classes. Les expérimentations déjà existantes ne sont pas remplacées, elles permettront de nourrir la réflexion de ce groupe de travail pour définir un modèle pérenne pour les rentrées suivantes. Un essaimage au niveau national est en effet prévu pour les prochaines rentrées.
H.fr : On entend depuis des années qu’il faut former aussi les enseignants ; à quand des mesures concrètes de sensibilisation au handicap lors de la formation initiale pour tous ?
SC : Une plateforme ressources pour faciliter la mise en place des adaptations pédagogiques est en cours de développement. Elle prévoit la mobilisation de personnels ressources autant que nécessaire. La sensibilisation des futurs enseignants dans le cadre de leur formation initiale est déjà présente. Il s’agit de dépasser maintenant cette sensibilisation pour basculer vers une formation plus complète en matière d’école inclusive.
H.fr : À partir du 10 septembre 2018, le gouvernement lance une concertation pour rénover le dispositif d’accompagnement des élèves en situation de handicap dès la rentrée 2019 ? C’est donc d’ici un an que tout va se jouer ? Quelles sont les grandes priorités ?
SC : Trois grandes priorités :
1. Améliorer la qualité de la scolarisation des élèves en situation de handicap.
2. Mieux reconnaître les accompagnants et leur ouvrir des perspectives d’avenir.
3. Expérimenter des pôles inclusifs d’accompagnement localisés.
Source : https://informations.handicap.fr/art-politique-ecole-cluzel-1077-11077.php
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