Un rapport parlementaire fait état de l’accroissement du nombre d’élèves handicapés à l’école tout en pointant les axes d’amélioration. A travers l’accessibilité du bâti, la formation des Atsem ou l’accompagnement sur les temps périscolaires, les collectivités territoriales sont visées par les recommandations.

Proposer un acte II de l’école inclusive pour permettre le passage « d’une politique du handicap axée sur la compensation à celle promouvant l’accessibilité universelle », telle est l’ambition d’un rapport de la commission d’enquête de l’Assemblée nationale « sur l’inclusion des élèves handicapés à l’école et à l’université de la République, quatorze ans après la loi du 11 février 2005 », remis le 8 octobre à Jean-Michel Blanquer, ministre de l’Education nationale, et à Sophie Cluzel, secrétaire d’Etat chargée des Personnes handicapées.

Son rapporteur, le député de la Seine-Maritime Sébastien Jumel, s’est attelé à mettre en avant ce que l’on sait de l’inclusion des élèves handicapés à l’école, mais aussi ce que l’on ne sait pas. Une approche guidée par un manque d’information corroboré par de nombreux témoignages. De fait, « de l’aveu même du gouvernement, le nombre d’élèves et d’étudiants en situation de handicap n’est pas connu avec certitude ».

Doublement des effectifs en dix ans

Si le nombre d’élèves bénéficiaires d’un projet personnalisé de scolarisation (PPS) scolarisés en établissement hospitalier ou médicosocial n’est pas connu pour l’année scolaire 2018-2019, le rapport établit à 337.795 le nombre des élèves scolarisés en milieu ordinaire dans les premier et second degrés pour cette même année. Toujours au chapitre des chiffres-clés, notons qu’au 31 mars dernier, 93.787 élèves bénéficiaient d’un accompagnement collectif en Ulis (unité localisée pour l’inclusion scolaire).

Globalement, et toujours selon les chiffres disponibles, « la scolarisation en milieu ordinaire s’est considérablement développée d’un point de vue quantitatif au cours des dix dernières années – au point que les effectifs d’élèves en situation de handicap ont presque doublé sur cette période ». Toutefois, le rapport indique que leur proportion, rapportée au nombre total d’élèves en situation de handicap, stagne autour de 70% sur la même période. Par ailleurs, cette part décroît au fur et à mesure de la scolarité : à six ans, 85% des élèves en situation de handicap sont scolarisés en classe ordinaire, mais ils ne sont plus que 46% à dix ans. Le rapport précise encore que les élèves porteurs de troubles intellectuels rencontrent plus de difficultés à suivre un cursus ordinaire que ceux souffrant de troubles physiques.

Pour Bénédicte Kail, conseillère nationale à l’APF-France Handicap, cela « montre que l’école ne fait une place aux élèves handicapés qu’à condition qu’ils soient capables de s’adapter à l’école ». Et le rapporteur d’ajouter que « le principe même de l’inclusion scolaire voudrait qu’à l’inverse, ce soit l’école qui s’adapte aux élèves en situation de handicap ». D’où l’idée de proposer un acte II de l’école inclusive…

Rendre le bâti accessible

En matière de scolarisation des élèves handicapés, l’accessibilité du bâti scolaire, jugée « encore très limitée », apparaît comme un point crucial. Ici, l’inégalité tient avant tout du type d’établissement. Car si parmi les écoles qui scolarisent des élèves handicapés, plus des deux tiers le font dans des conditions satisfaisantes, seuls 40% des collèges et 20% des lycées se montrent conformes aux règles d’accessibilité. « Cette faible accessibilité du bâti a des conséquences considérables sur les choix d’orientation des jeunes en situation de handicap », pointe le rapport. Lors de son audition, Sophie Cluzel avait fait remarquer que « ce qui fait capoter l’école inclusive, ce sont des grains de sable et, indéniablement, le besoin de locaux ; aussi devons-nous travailler en amont avec les communes ».

Le rapport avance alors que « le ministère de l’Education nationale a […] annoncé sa volonté de mettre en place, avec la Caisse des dépôts et consignations, une cellule sur le bâti scolaire, visant à apporter un soutien aux collectivités territoriales, en particulier sur l’adaptation du bâti », et précise que « c’est une piste intéressante, pour laquelle aucun calendrier n’a néanmoins été annoncé et dont les contours demeurent à préciser ». Retenons que la mise en accessibilité d’un collège de taille moyenne (5.000 m2) représente un investissement d’environ 250.000 euros. Sans surprise, l’une des propositions du rapport consiste à « mettre en place un plan d’accompagnement des collectivités territoriales en s’appuyant sur la recherche et l’innovation, par une programmation des moyens et la recherche de mutualisations au niveau des territoires ».

Former les Atsem, clarifier le financement du périscolaire

Parmi les autres recommandations du rapport intéressant les collectivités au premier chef, une vise à « déployer un vaste plan de formation national, […] ancré dans les réalités du terrain et décliné dans chaque rectorat et chaque département de façon à mettre à niveau les connaissances de tous les personnels, et attribuer pour cela les moyens de remplacement nécessaires ». Outre les enseignants et personnels de direction des établissements scolaires, ce plan devrait aussi s’adresser aux Atsem (agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles) et AESH (accompagnants d’élèves en situation de handicap).

Enfin, autre thème abordé dans le rapport : l’accompagnement sur les temps péri et extrascolaires met en avant des carences du côté des collectivités. Virginie Lanlo, adjointe au maire de Meudon et membre de l’Association des maires de France (AMF), a ainsi expliqué à la commission que « très souvent, les communes sont mises devant le fait accompli et sont informées au dernier moment de la présence d’enfants en situation de handicap, qui aurait nécessité notamment une adaptation des locaux mais également la mise à disposition de personnels d’accompagnement sur différents temps ». Le Défenseur des droits a pour sa part regretté que les disparités de traitement d’un territoire à l’autre « prennent une dimension caricaturale en matière de tarification de la restauration scolaire » que les maires « justifient par le principe de libre administration des collectivités territoriales ». Ici, la proposition a le mérite de la clarté et devrait faire l’unanimité chez les élus locaux : « Clarifier la responsabilité du financement de l’accompagnement des élèves en situation de handicap sur les temps péri et extrascolaires en la mettant explicitement à la charge de l’Etat. »

Source : https://www.banquedesterritoires.fr/handicap-lecole-pour-un-acte-ii-de-la-loi-de-2005?pk_campaign=newsletter_hebdo&pk_kwd=2019-10-11&pk_source=Actualit%C3%A9s_Localtis&pk_medium=newsletter_hebdo

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