Le Comité national de suivi de l’école inclusive a tiré un premier bilan de la rentrée 2019. L’ensemble est « encourageant » même si des disparités territoriales se font jour dans le déploiement des pôles inclusifs d’accompagnement localisé.
« Nous avons des élèves handicapés davantage accueillis et mieux accueillis », s’est félicité le 4 novembre Jean-Michel Blanquer, le ministre de l’Éducation nationale et de la Jeunesse, à l’issue du Comité national de suivi de l’école inclusive,. A ses côtés, la secrétaire d’Etat chargée des personnes handicapées, Sophie Cluzel, a pour sa part notamment insisté sur la nécessité de « simplifier la vie des familles ».
Dans un contexte de « très forte croissance du nombre d’élèves en situation de handicap », avec 361.500 élèves accueillis à l’école en 2019 contre 118.000 en 2006, le premier motif de satisfaction est le taux de scolarisation à temps plein des élèves handicapés dans le premier degré, porté à 87%. Par ailleurs, le nombre d’élèves en attente d’un accompagnant a été divisé par deux entre 2018 et 2019 (4% contre 8%), ce qui a permis l’accueil de 50.000 élèves supplémentaires à la rentrée 2019. Tels sont en tout cas les chiffres diffusés à l’issue de ce comité dont l’objet était de faire état du bilan de la rentrée 2019.
En ce qui concerne les modes de scolarisation, le comité de suivi fait état de 305 créations d’Ulis (unités localisées d’inclusion scolaire), 24 Uema (unités d’enseignement maternelles autisme) et 20 UEEA (unités d’enseignement élémentaires autisme). Au niveau de l’organisation de l’accueil des élèves handicapés toujours, le bilan montre une progression de 7,2% des moyens en équivalent temps plein pour les quelque 90.000 accompagnants (AESH). Le changement de statut des AESH, qui sont passés de contrats aidés à des CDD de trois ans transformables en CDI, faisait partie des principales mesures nouvelles.
Pial : des disparités territoriales
Quant aux Pial (pôles inclusifs d’accompagnement localisés), qui coordonnent désormais l’activité des accompagnants au niveau des établissements scolaires, on en dénombre 2.600 qui rassemblent 20.992 écoles (39% de l’ensemble), 4.721 collèges (48%) et 1.529 lycées (37%). Ici le bilan fait état de fortes disparités territoriales : si 24 départements voient plus 90% de leurs établissements inclus dans un Pial, dans 40 départements, moins de 20% des écoles, collèges et lycées sont impliqués. L’ensemble du territoire national doit être couvert par ce nouveau dispositif en 2022.
En outre, on recense 117 Pial renforcés, constitués d’équipes mobiles d’appui où interviennent des personnels des établissements et des services médicosociaux. Là encore, tous les territoires ne sont pas logés à la même enseigne. Si l’Occitanie (13 Pial renforcés) et la Nouvelle-Aquitaine (12) sont bien dotées, l’Île-de-France (3 Pial renforcés), la Normandie (3), l’Auvergne-Rhône-Alpes (3), le Centre-Val de Loire (2) et la Bourgogne-Franche-Comté (2) le sont moins.
Autre nouveauté de la rentrée 2019 : les agences régionales de santé (ARS) et les professionnels médicosociaux et libéraux ont mis en place, à titre expérimental, 65 équipes mobiles médicosociales qui viennent en appui des enseignants au sein des écoles et établissements scolaires dans leur département de rattachement.
Recrutements conjoints Éducation nationale/communes
Enfin, le comité a annoncé ses priorités pour 2020. Il mettra en place des indicateurs pour suivre la mise en œuvre des mesures. Ce travail sera facilité par un système d’information de l’Éducation nationale interconnecté avec celui des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) actuellement à l’étude. La simplification des démarches pour les familles se poursuivra à travers, par exemple, la garantie d’une équité territoriale en harmonisant les pratiques des MDPH.
Il est à noter une mesure qui touche directement les collectivités : dans le cadre de l’amélioration de l’accès des élèves handicapés aux accueils péri et extrascolaires, un groupe de travail sera mis en place afin de simplifier et d’étendre les possibilités de recrutement conjoint, par exemple entre l’Éducation nationale et la commune.
Le Comité national de suivi de l’école inclusive, installé le 17 juillet dernier, regroupe des parents, des enseignants et des professionnels de l’éducation, des professionnels du handicap, des associations, des représentants des administrations et des collectivités territoriales, et des parlementaires.
Sur le terrain toutefois…
A écouter parents et associations, sur le terrain, le bilan se révèle plus nuancé. « Globalement le bilan de la rentrée n’est pas satisfaisant », estime ainsi Marion Aubry, vice-présidente de l’association TouPI, qui défend les droits des handicapés. « De nombreux enfants ont besoin d’un accompagnement individuel à temps plein et ne bénéficient que d’une aide à temps partiel », explique-t-elle. « Comme on manque d’accompagnants, c’est le parent qui râle le plus fort qui a le plus de chance d’être entendu », déplore-t-elle. Un constat confirmé par Caroline, mère d’une jeune trisomique scolarisée en maternelle en Loire-Atlantique, qui bénéficie depuis la rentrée d’un accompagnement de 15 heures par semaine. « Avant les vacances de la Toussaint, un inspecteur m’a demandé si on pouvait garder ma fille à la maison pendant les heures où elle n’a pas d’accompagnement », raconte Caroline, qui se dit « minée » par cette demande « illégale ».
Malgré les mesures visant à améliorer l’attractivité du métier, les ministres admettent que le recrutement de ces personnels reste difficile, notamment en Ile-de-France. « Les accompagnants d’élèves handicapés sont très souvent des femmes seules, il est urgent de les sortir de la précarité », a souligné le 4 novembre le député communiste Sébastien Jumel, rapporteur d’un récent rapport sur l’inclusion des élèves handicapés. Un mois et demi après la rentrée, nombre d’entre eux n’avaient toujours pas été payés. « Les nouveaux contrats ont été mis en place dans une grande précipitation et tous n’ont pas pu être modifiés en temps et en heure », explique à l’AFP Sophia Catella, du syndicat Snuipp-FSU. Son autre crainte concerne les PIAL, implantés pour le moment dans 40% des écoles, collèges et lycées. « On se dirige vers davantage de mutualisation, ce qui signifie que les AESH vont devoir se partager davantage d’enfants et que tous n’auront pas le nombre d’heures d’accompagnement nécessaires », redoute Sophia Catella, qui reconnaît toutefois : « Quand on a des remontées de terrain, c’est toujours lorsqu’il y a des dysfonctionnements, pas quand ça se passe bien ».
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