Alors que le Gouvernement a enfin entériné la séparation des revenus du conjoint dans le calcul de l’allocation aux adultes handicapés (AAH, lire cet article) , une association s’attaque à la récente conjugalisation de la prestation de la compensation du handicap (PCH).
Le 11 août dernier, l’association Handi – Social a ainsi fait savoir avoir déposé un recours gracieux auprès de la Première ministre, Élisabeth Borne (à télécharger ci-dessous).
Elle attaque le décret du 25 avril 2022 relatif à l’amélioration des fonds départementaux de compensation du handicap. Après dix-sept ans d’attente et deux condamnations, l’État a avec ce texte enfin introduit le plafonnement du reste à charge et acté l’obligation de financement des frais de compensation du handicap des usagers dépassant 10% du montant de leurs ressources.
Mais, le décret vient également — sur le modèle de l’AAH — conjugaliser la compensation du handicap en faisant dépendre son montant des revenus du foyer fiscal de référence, en intégrant les revenus du conjoint. En vigueur depuis le 1er juillet 2022, le texte, estime l’association, « vide de son effectivité le principe de compensation du handicap instauré par la loi du11 février 2005″ et contrevient à la notion de « ressources personnelles » pourtant inscrite à l’article L146-5 du Code de l’action sociale et des familles (Casf). Une lecture qui s’inscrit dans la lignée de l’avis du Conseil national consultatif des personnes handicapées (CNCPH), qui qualifiait la mesure de « recul inacceptable« .
Considérant que cette « limite au droit à la compensation » constitue une « violation » de la loi du 11 février 2005, de l’article du Casf et du Code général des impôts, Handi-Social a donc interpellé en plus haut lieu le 26 juin dernier pour déplorer une remise en cause de ce droit « fondamental« .
Dans son recours gracieux auprès de la Première ministre, Me David Nabet-Martin, avocat au barreau de Toulouse (Haute-Garonne) et conseil de l’association, rappelle « le caractère inéquitable » des modalités de calcul car elles « réduisent la faculté d’attribution de l’aide financière« . Ces dispositions, avance l’avocat, sont également introduites contra legem.
Ce détournement des dispositions de la loi n’est pas la première opérée par l’exécutif. Jugement du Conseil d’État du 24 février 2016 à l’appui, David Nabet-Martin rappelle que les dispositions de l’article L146-5 « ne laissent pas à la libre appréciation du Premier ministre l’édiction du décret dont elles prévoient l’intervention« . Et de brandir dans son argumentation le possible engagement de la responsabilité de l’État pour rupture d’égalité à défaut de mesures compensatoires adaptées.
L’avocat demande donc « de manière gracieuse de procéder aux modifications utiles afin de respecter le texte de loi, en ne faisant plus dépendre l’attribution des aides financières[…] des revenus de l’ensemble du foyer fiscal« .
À défaut de voir le Gouvernement se mettre en conformité, l’association prévoit de saisir les juridictions compétentes « pour solliciter la condamnation de l’État et remettre en cause la constitutionnalité de la loi du 6 mars 2020« . Est visée la nouvelle rédaction de l’article L146-5, introduisant la mention « dans la limite des financements du fonds départemental de compensation » pour condition le remboursement des frais de compensation. Cette mention, souligne l’avocat, « remet en cause le principe même du droit à compensation effective du handicap« .
En savoir plus sur Le Collectif Handicap 54
Subscribe to get the latest posts sent to your email.