Presque quinze ans après la ratification de la Convention relative aux droits des personnes handicapées (CDPH), la France continue d’ignorer ses engagements internationaux et de bafouer les droits de millions de personnes en situation de handicap. Un constat régulièrement et depuis longtemps dénoncé par les associations représentatives des personnes en situation de handicap regroupées au sein du Collectif Handicaps et du Conseil Français des personnes Handicapées pour les affaires Européennes et internationales (CFHE)…
Avec pour objectif de promouvoir, protéger et assurer la pleine et égale jouissance des droits humains, en interdisant toute forme de discrimination fondée sur le handicap, la CDPH est le texte de référence en ce qui concerne la participation sociale et la citoyenneté des personnes en situation de handicap.
Hélas, du fait d’interprétations diverses, de positions dogmatiques et d’un manque d’ambition politique, la CDPH n’a pas produit tous les effets escomptés et n’a pas suffisamment transformé le quotidien des personnes. Parfois même, la CDPH est utilisée pour justifier des atteintes à la liberté de choix des personnes. Le débat sur la désinstitutionalisation en est symptomatique : au lieu de plaider pour le développement d’une offre d’accompagnement adaptée aux besoins et aux parcours de vie des personnes, certains réclament la fermeture de tous les établissements médico-sociaux – au détriment direct des personnes souhaitant être accompagnées de cette manière. Au-delà de toute polémique inutile, nous réaffirmons notre attachement à l’article 19 de la CDPH, dans son entièreté, qui reconnait « le droit de vivre dans la société, avec la même liberté de choix que les autres personnes » et appelle la France à prendre « des mesures efficaces et appropriées pour faciliter aux personnes handicapées la pleine jouissance de ce droit ainsi que leur pleine intégration et participation à la société ».
Quinze ans plus tard, l’accessibilité universelle reste une chimère, les freins à la participation sociale des personnes en situation de handicap persistent, les préjugés ont la vie dure… Face à ces discriminations quotidiennes, il est plus que jamais essentiel de revenir aux fondements du texte et promouvoir une transition inclusive.
Nous ne voulons plus de beaux discours et de grandes promesses. Nous ne voulons plus d’évaluations et de longs rapports, qui reflètent le manque de volonté politique et le déficit de mobilisation collective. Il est temps d’agir. La Journée internationale des personnes handicapées n’est pas qu’un rendez-vous symbolique. C’est un appel à ouvrir les yeux sur l’injustice quotidienne vécue par des millions de citoyens et citoyennes. Si la France aspire encore à être un modèle en matière de droits humains, elle doit agir sans délai. Les pouvoirs publics peuvent s’appuyer sur l’expertise et la mobilisation associative pour mener les changements profonds dont notre pays a désespérément besoin. La société inclusive n’est pas une option, c’est une exigence morale et un impératif démocratique.
En 2025, la France aura le choix : faire une énième évaluation de la loi du 11 février 2005 et être jugée pour un échec historique ou annoncer des changements concrets et enfin respecter ses engagements internationaux. Le Collectif Handicaps et le CFHE travaillent avec toutes leurs associations membres à l’élaboration de propositions concrètes pour améliorer le quotidien des personnes concernées, sur lesquelles les pouvoirs publics peuvent s’appuyer. Il est encore temps de changer de cap.
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Concernant les personnes qui ne peuvent pas faire sans l’institution (polyhandicap/handicap intellectuel sévère), pourquoi ne pas nous retrouver un 1er samedi de chaque mois ou de chaque mois pair devant chaque maison départementale avec nos proches en situation de handicap? Les CA et autres organisations de décision sont exclusivement composés d’hommes qui ne consacre en moyenne que 2 heures par jour au foyer, 4 pour leur épouse et 7 lorsque nous sommes en monoparentalité ce qui est à plus de 90% le cas dès qu’on se trouve avec polyhandicap ou handicap intellectuel sévère. Les politiques n’ont aucune notion de ce qu’est notre réalité. Il faut sortir de l’invisibilité et faire comme font d’autres communautés de destin dans le monde, nous montrer physiquement. A moins que nous ne choisissions localement un lieu plus en phase avec les besoins de nos proches. Mais il faut nous montrer de façon récurrente et pas une fois par an comme « la fête des mères » (quel cynisme pour nous!).
Bonjour. Merci pour votre témoignage et votre proposition. Chacun œuvre à sa manière pour rendre visible les difficultés, mais le plus efficace a toujours été de se rassembler dans des associations qui font avancer les droits. Même si les CA sont encore majoritairement masculins, les mères d’enfants en situation de handicap doivent s’engager pour dire leur condition de vie et faire avancer leur reconnaissance auprès des pouvoirs publics. Et de ce fait, je ne crois pas que les MDPH soient de bons boucs émissaires : elles manquent cruellement de moyens pour instruire correctement les dossiers (malgré les efforts de certains CD) et elles attendent parfois des décrets qui ne viennent pas pour appliquer la loi. Ce sont les gouvernements successifs qui ne prennent pas les mesures pour faire appliquer concrètement la loi de 2005 ou qui ne financent pas suffisamment les besoins des personnes et de leurs familles par exemple. En attendant, bien à vous.