Par lettre en date du 15 décembre1, la ministre des solidarités et de la santé et la secrétaire d’Etat auprès du Premier ministre chargée des personnes handicapées ont chargé l’IGAS d’une mission relative à la compensation pour les enfants en situation de handicap, dont l’objectif premier est d’aboutir à une “évolution (de l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé -AEEH- et de la prestation de compensation du handicap -PCH-) et de leur articulation”.

Cette mission constitue l’un des cinq chantiers préparatoires à la CNH 2018-2019, sous l’intitulé : “Améliorer la compensation du handicap des enfants et clarifier l’articulation entre la PCH et l’AEEH”,

Centrée sur la question cruciale du « droit d’option »2, et de l’articulation entre l’AEEH et la PCH, mais aussi avec l’allocation journalière de présence parentale (AJPP), il s’agit surtout dans le prolongement d’un précédent rapport du député Adrien Taquet et du conseiller Jean François Serres (Cese)3, de « simplifier et améliorer la compensation du handicap (des enfants) », afin de “remédier aux insuffisances et aux difficultés bien identifiées de la situation actuelle”.

Conformément à la lettre de mission, les travaux se sont appuyés sur un groupe de concertation, composé à parité de représentants du CNCPH et des parties prenantes publiques (administrations centrales, départements et caisses nationales), travaux qui, compte tenu de la complexité du sujet, ont été complétés, avec la collaboration du CafLab4 par trois ateliers nationaux relatifs aux différents “blocs” de prestations et associant des experts, usagers et techniciens, des institutions gestionnaires, ainsi que trois réunions départementales avec des groupes focus de parents et avec les parties prenantes (département, Caf, MDPH, ARS, CPAM).

Le recours à cette méthode originale était justifié par le choix du scénario d’architecture cible fait avec le groupe de concertation, et conduisant à dissocier, dans le prolongement de la recommandation du rapport “Taquet-Serres” :

  • une AEEH ramenée “à sa seule dimension d’allocation”
  • “complétée par une PCH aux critères d’éligibilité plus adaptés aux besoins des enfants, et qui intègre les éléments actuels de l’AEEH qui relèvent de la compensation”.

La complexité de l’exercice vient du fait que “ces éléments de l’AEEH qui relèvent de la compensation” sont intégrés dans les compléments de l’AEEH, qui viennent majorer la prestation de base (132,21 €), prestations en espèce donc, mais dont les montants (qui peuvent varier de 99,16 € pour le complément 1 à 1121,92 € pour le complément 6) sont fixés par les MDPH en fonction des divers besoins en nature qu’ont à couvrir les familles confrontées au handicap d’un ou plusieurs de leurs enfants, et qu’en réalité, sinon en droit, on ne sait pas précisément ce que couvrent ces compléments versés par les Caf, qui, compte tenu de leur nature de prestation en espèce, font l’objet d’une grande liberté d’utilisation de la part des parents, alors que la PCH fait l’objet de contrôles d’effectivité extrêmement détaillés de la part des services des départements. De surcroît, le traitement fiscal et social de l’indemnisation du “temps parental” conduit à ce que celle-ci soit intégrée dans la base ressource des prestations sous condition de ressource (RSA, allocations logements, prime d’activité) pour la PCH, alors qu’elle ne l’est pas pour les compléments de l’AEEH, ce qui, suite à une jurisprudence récente du Conseil d’Etat, est ressenti comme une inégalité de traitement et fait l’objet d’une forte contestation de la part des associations.

Compte tenu de la difficulté à redéfinir l’AEEH et surtout ses compléments, la loi de financement pour la Sécurité sociale de 2008, qui a ouvert la PCH aux enfants, avait maintenu, à titre transitoire, les deux prestations et institué pour les parents un “droit d’option”, complexe à exercer entre l’une et l’autre. Dix ans après, pour les raisons indiquées ci-dessus, le recours reste massif aux compléments de l’AEEH, “choisis” par quelques cent mille familles (ou souvent, pour elles, par la MDPH), contre une vingtaine de mille pour la PCH. Compte tenu de l’inadaptation de la PCH à la situation des enfants, le risque serait donc qu’une grande partie des enfants concernés qui bénéficient d’une forme de compensation via les compléments, se retrouvent sans compensation avec la PCH.

Sur la base de ces constats et des travaux conduits, le rapport propose une nouvelle cartographie des prestations proposées aux familles, permettant d’accompagner les parcours des enfants en situation de handicap de la naissance à l’âge adulte, réforme structurelle du dispositif actuel qui nécessiterait, si elle se met en place, de passer par une phase de transition.

1 Cf. la lettre de mission en fin de rapport.
2 Cf.; infra, 1, la définition du droit d’option ainsi que l’annexe.
3 “Plus simple la vie, 113 propositions pour améliorer le quotidien des personnes en situation de handicap” (mai 2018)
4 Laboratoire d’innovation créé par la branche famille pour, notamment, travailler l’ingénierie des prestations dans une optique de simplification pour l’usager.
RAPPORT IGAS N°2018-126R


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