Sur les 430 000 enfants en situation de handicap en France, tous ne sont pas logés à la même enseigne concernant l’école. Pour cette rentrée 2022, des milliers de familles vont être laissées sur le carreau, faute de moyens.
Malgré les discours, l’école « inclusive », qui vise à offrir une éducation de qualité à tous les enfants, n’atteint pas encore ses objectifs. Une part importante des enfants atteints d’un handicap intellectuel ou cognitif ne seront scolarisés à la rentrée que « quelques heures par semaine, voire pas du tout« , s’est alarmée ce 22 août l’Unapei, l’une des principales associations du secteur.
430 000 élèves en situation de handicap
« Encore une fois« , les élèves porteurs de ce type de handicap « sont les invisibles, les oubliés » et « leurs droits sont toujours bafoués« , a dénoncé dans un communiqué Luc Gateau, le président de cette fédération regroupant des associations de personnes handicapées mentales et leurs familles.
« Ce n’est pas aux parents d’assumer ce défaut de scolarisation » de leurs enfants handicapés, dénonce Sonia Ahehehinnou, vice-présidente de l’Unapei, fédération regroupant des associations de personnes handicapées mentales et leurs familles, sur franceinfo ce 22 août.
En cause, notamment, le manque de moyens pour encadrer ces enfants, dont beaucoup ont besoin d’être accompagnés. On compte pour cette rentrée 430 000 élèves en situation de handicap, soit 20 000 de plus qu’en 2021. Parallèlement, seuls 4000 nouveaux AESH (accompagnants d’élève en situation de handicap) seront recrutés pour septembre 2022 selon le gouvernement.
Le gouvernement annonce une croissance du nombre d’élèves en situation de handicap scolarisés mais si les dispositifs qui les accueillent ne sont pas calibrés en conséquence et adaptés, on ne pourra pas tous les accueillirSonia Ahehehinnou
Localement, les objectifs du gouvernement sur l’école inclusive se heurtent à la réalité. « Officiellement, pour l’Éducation nationale, on dira que chaque enfant qui a besoin d’un accompagnement va l’avoir« , grince Aline Pasnon, co-secrétaire départementale de la Snuipp-FSU du Loir-et-Cher. « Mais dans les faits, on aura une qualité d’accompagnement très variable, avec certaines AESH qui vont devoir s’occuper de 2, 3 ou 4 enfants à la fois. C’est du saupoudrage.«
Dans le département voisin de l’Indre-et-Loire, environ 260 élèves nécessitant un accompagnement se retrouvent sans AESH, estime Valérie Souchet, également de la Snuipp-FSU.
Au cours de ses 13 ans de carrière, cette accompagnante a elle-même vécu des situations « très inconfortables, à la fois pour l’enfant, pour la famille et pour nous« , où elle doit le même jour s’occuper de 2 à 4 enfants en même temps. « Si on a de la chance, ils sont dans le même établissement, là c’est formidable ! » Sinon, il faut faire la navette, parfois entre plusieurs villes. Et il n’y a guère de marge de manœuvre en cas d’urgence ou s’il faut un remplacement. Le tout, dans le cadre d’un temps partiel de 24 heures par semaine, payé 860 euros par mois.
Scolariser, un enjeu d’inclusion
« La réalité du terrain, c’est qu’il y a aussi régulièrement des enfants qui n’arrivent pas à être élèves, qui ne s’y retrouvent pas, qui font parfois des crises, avec des cris, des objets jetés, des coups« , note aussi Aline Pasnon. Pour eux, il existe des institutions spécialisées, comme les IME et les ITEP, où 67 000 enfants sont pris en charge à l’écart du système scolaire.
Mais généraliser cette institutionnalisation n’est pas souhaitable. « On est dans une société où on souhaite que la différence, le handicap, ne soient pas montrés du doigt, et où les élèves différents doivent être inclus. Tous les élèves n’ont pas forcément besoin d’un accompagnement. L’objectif, à terme, c’est qu’ils puissent devenir autonome.«
Scolariser les enfants handicapés, c’est donc à la fois une manière de ne plus stigmatiser le handicap, et d’offrir à ces enfants la possibilité de se socialiser et d’apprendre à vivre ensemble.
Un enfant handicapé sur cinq privé d’école
À l’inverse, l’absence de scolarisation, ou une scolarisation inadaptée, a des « conséquences dramatiques » pour les familles, souvent « éreintées« , dénonce l’Unapei, qui pour la première fois cette année a souhaité quantifier les manques.
Pour ce faire, elle a constitué un échantillon de 7 949 enfants ou adolescents en situation de handicap accompagnés par ses antennes locales dans toute la France. Sur ce total, 18% « n’ont aucune heure de scolarisation par semaine« , 33% entre 0 et 6 heures, 22% entre 6 et 12 heures, et seulement 27% bénéficient d’au moins 12 heures d’enseignement hebdomadaires.
A l’école, les dispositifs déployés par le gouvernement le sont « sans s’attacher à la qualité de la scolarisation » qui suppose un temps d’enseignement suffisant et un accompagnement adapté aux besoins de chacun, souligne auprès de l’AFP Sonia Ahehehinnou, la vice-présidente de l’Unapei.
« Nous repartons de zéro »
L’Unapei appelle notamment à une meilleure formation des enseignants et à une adaptation des effectifs des classes accueillant des élèves handicapés.
Certaines familles attendent pendant des années une solution satisfaisante, souligne l’association qui cite le cas d’une fillette de 6 ans dont les parents ont longtemps espéré bénéficier d’un service d’accompagnement à domicile (Sessad). Après deux ans de vaine patience, ils n’ont rien obtenu et on les a finalement orientés vers un IME, avec… quatre ans d’attente à la clef. « Nous repartons de zéro« , se désolent les parents, cités par l’Unapei.
En octobre 2021, les AESH avaient lancé un mouvement de grève, demandant une hausse de salaires, davantage de temps plein et une évolution de leur statut. À l’aube de la rentrée 2022, leurs revendications restent pour l’instant sans réponse.
Source : https://france3-regions.francetvinfo.fr/centre-val-de-loire/loir-cher/blois/rentree-des-milliers-d-enfants-handicapes-risquent-d-etre-prives-d-ecole-alertent-les-associations-2600116.html
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